Rome : mon coup de cœur pour le quartier du Ghetto

par Pierre
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Vieille maison à Rome.

Je vous le dis d’emblée : le Ghetto est l’un de mes quartiers préférés de Rome ! La raison ? Il se trouve en plein cœur de la vieille ville mais ne compte aucun monument incontournable, aucun grand musée… Pour moi le quartier idéal pour prendre un verre et/ou écrire ses cartes postales… En un mot : pour souffler un peu au débouché des secteurs très touristiques comme le Forum, les abords du palais Farnèse, de la place Navone ou du Panthéon. 

 

Logo du quartier Sant'Angelo à Rome. À titre personnel, je connais plus le Ghetto sous le nom de « quartier Sant’Angelo ». C’est d’ailleurs sous cette appelation qu’il est reconnu comme l’un des 22 « rioni » ou quartiers officiels de la Ville Éternelle (attention toutefois : le quartier Sant’Angelo n’a rien à voir avec le château Saint-Ange… Ils ne se trouvent pas au même endroit !).

Il se situe donc entre le Capitole, le Tibre (au-delà il y a le quartier du Trastevere), le Campo dei Fiori et le Corso Vittorio Emanuele II. En soi le Ghetto n’est pas très grand et on ne s’y bouscule pas.

Comme toujours à Rome, oubliez les plans d’urbanisme : c’est un lacis de placettes irrégulières (comme la Piazza Margana où a été prise la photo de couverture), de ruelles qui partent dans tous les sens, on y fait des détours, il n’y a que des tangentes et pas de perspectives…

Comme toujours à Rome, vous y trouvez des églises et des temples romains imbriqués dans les maisons, comme si c’était la chose la plus naturelle du monde.

Comme toujours à Rome, une fois que vous sortez de la piste aux éléphants, vous tombez tout de suite dans un vrai quartier, avec une vraie vie et de vrais habitants…  

Pour vous orienter un peu, je vous ai concocté une petite carte :

Carte touristique du Ghetto à Rome.

Voici mes incontournables pour une visite du Ghetto à Rome.

 

LE LARGO ARGENTINA ET… LES CHATS DE ROME

Allez, je suis sympa : j’inclus cette place dans le circuit de visite du Ghetto. Elle ne correspond pas trop à l’esprit du quartier mais c’en est une des portes d’entrée.

C’est nœud de circulation primordial de Rome avec ses flots de voitures filant entre le Vatican et la Piazza Venezia, ses bus, ses tramways, ses touristes en goguette entre le Panthéon, l’église du Gesù et la “machine à écrire” : le monument à Victor Emmanuel II…

Place archéologique à Rome.

Abscons, les temples du Largo Argentina ? Demandez donc aux chats ! © Carigami / Pierre Feisthauer

Au centre de cette place passant, il y une oasis un peu surréaliste : une zone archéologique comprenant quatre temples romains au passé obscur, au demeurant pas franchement très pédagogique. Mais tout le monde s’en fiche un peu car cette forêt de colonnes et de pins est inaccessible au public… enfin presque : les chats l’ont colonisée et y déambulent calmement. Ils sont, et de loin, la principale attraction du lieu !

 

LE PALAZZO MATTEI DI GIOVE

On découvre un peu par hasard ce palais, construit au tout début du XVIIe siècle par le célèbre architecte Carlo Maderno. Bon, de l’extérieur il n’a rien d’exceptionnel : il faut y pénétrer par la Via Caetani. N’hésitez pas, l’entrée est libre (le palais est aujourd’hui un site du ministère de la Culture).

Dessin d'un palais à Rome.

Croquis sur le vif : un balcon de la cour du Palazzo Mattei. © Carigami / Pierre Feisthauer

On découvre alors sa petite cour intérieure, majestueuse, comme restée intacte depuis sa création, avec ses murs délavés, ses œuvres d’art antiques mises en scène dans tous les interstices architecturaux, sa loggia du premier étage… 

 

LA FONTAINE DES TORTUES

Une fontaine à Rome.

La petite et gracieuse Fontaine des Tortues. © Carigami / Pierre Feisthauer

C’est à un membre de la famille Mattei que l’on devrait la délicieuse fontaine des Tortues (Fontana delle Tartarughe) toute proche.

Il l’aurait fait édifier en une seule nuit, en 1582, par le grand artiste de la Renaissance Giacomo della Porta (à qui l’on doit la coupole de la basilique Saint-Pierre, les bâtiments du Capitole, l’église du Gesù, les fontaines de la place Navone entre autres, excusez du peu !) afin de prouver sa richesse et sa puissance.

Les tortues n’existaient pourtant pas à l’origine…C’est une autre “star” artistique de Rome, Le Bernin, qui les rajouta près d’un siècle plus tard…

 

L’ÉGLISE SANTA CATERINA DEI FUNARI

Dans le quartier Sant’Angelo, vous trouverez plusieurs églises modestes, dont beaucoup ont portes closes. Elles semblent assoupies, désertées et pourtant des bougies y brillent toujours. Je pense à San Nicola in Carcere, San Gregorio della Divina Pietà, San Tommaso dei Cenci (sur la Piazza delle Cinque Scole), Santa Maria in Publicolis… 

Mais pour moi, la plus jolie est Santa Caterina dei Funari, construite en 1560 pour les cordier (« Funari » en italien) qui habitaient en nombre autour d’elle. Elle possède un petit bijou de façade Renaissance et son intérieur est sobre, clair et délicat, à taille humaine. Ni trop écrasante, ni surchargée comme nombre de ses consœurs romaines, c’est celle que je vous conseille si vous ne deviez visiter qu’une seule église du quartier.

 

LA SYNAGOGUE DE ROME

La Synagogue (Tempio Maggiore) de Rome est le seul élément de théâtralité du quartier. Majestueuse, un peu pompeuse, richement décorée, lumineuse et colorée, elle s’insère pleinement dans le décor de la Ville Éternelle.

L’édifice est facilement reconnaissable depuis les hauteurs de Rome (Janicule, Capitole, Pincio…) : c’est le seul dôme à section carrée de la capitale italienne. Un dôme en aluminium d’ailleurs.

La Synagogue a été construite au tout début du XXe siècle après que le quartier fermé du Ghetto, dans lequel étaient parqués les Juifs de Rome depuis la Renaissance, a été démantelé sur ordre du roi d’Italie Victor-Emmanuel II.

Le Musée Juif, installé dans l’enceinte de la Synagogue, rappelle l’histoire de ce quartier. Il abrite un deuxième petit lieu de culte, le Tempio Spagnolo (Synagogue des Espagnols), de rite séfarade.

ℹ VISITER LA SYNAGOGUE DE ROME

Fermé les samedis et les jours de fêtes juives (en savoir plus en cliquant ici). Tarif entrée Synagogue + musée : 11 € plein tarif (février 2018).

 

LE PORTIQUE D’OCTAVIE

Cette colonnade blanche prise dans des murs de briques rouges était une des deux grandiloquentes portes d’entrée d’un  complexe monumental de l’époque romaine : ce « portique » (le terme désigne donc plus que la porte elle-même) comprenait deux temples, une bibliothèque et peut-être aussi des lieux d’enseignement…

Il faut beaucoup d’imagination pour se représenter le monument tel qu’il était à l’époque romaine. Mais ce qu’on appréciera avant tout, c’est encore une fois ce élicieux mélange des genres que propose Rome à longueur de rues : le Portique d’Octavie est aujourd’hui l’entrée de l’église Sant’Angelo in Pescheria, qui rappelle le marché aux poissons qui se tenait ici au Moyen Âge…

 

LE TEMPLE D’APOLLON SOSIANUS

Ce ne sont « que » trois colonnes, mais qu’elles sont belles… © Carigami / Pierre Feisthauer

De ce temple d’Apollon Sosianus, il ne reste pas grand chose : trois colonnes formant un angle, juste à côté du Portique d’Octavie et en face du théâtre de Marcellus (voir ci-après). Mais quand on déboule en voiture de la Piazza Venezia vers le Tibre, on ne peut pas les manquer : le monument se détache très clairement et attire immanquablement l’œil. 

Ces colonnes cannelées ont conservé leur base, leur chapiteaux, leur entablement finement ciselés : cela suffit pour être de toute beauté.

Elles sont sont une majestueuse figure de proue pour tout le quartier du Ghetto.

 

LE THÉÂTRE DE MARCELLUS

On reconnaît parfaitement sa colonnade curviligne en travertin (cette pierre blanchâtre et granuleuse si typique de Rome) qui se déploie en direction du Capitole.

Il doit son bon état de conservation au fait d’avoir été transformé en palais et en habitations plus modestes par la suite. C’est une vision un peu surréaliste que cette colonnade surmontée de fenêtres et de logements, comme si de rien n’était !

Le Théâtre de Marcellus est l’un des plus vieux de Rome : il fut construit au Ier siècle avant notre ère. Il pouvait accueillir à l’époque romaine quelque 15 000 spectateurs.

 

L’ÎLE TIBÉRINE

Allez, je vous rajoute un petit extra : l’île Tibérine (Isola Tiberina). On y accède par une floppée de ponts romains (le Ponte Fabricio, qui le plus ancien de Rome ; le Ponte Cestio ; le Ponte Rotto dont il ne reste plus qu’une arche au milieu du fleuve).

L’île Tibérine n’est pas une étape très courue du tour de Rome. Mais ce n’est pas nouveau : maudite pour les Romains, elle est depuis au moins deux millénaires dévolue à une vocation purement médicale.  On y trouve aujourd’hui :

La modeste basilique de Saint-Barthélemy-en-l’Île (San Bartolomeo all’Isola), avec son clocher de brique médiéval et sa façade de temple classique – un classique à Rome. Elle occupe l’emplacement de l’ancien temple d’Esculape, dieu romain de la médecine. À l’intérieur d’église, on remarquera que l’autel est une… ancienne baignoire romaine.

L’hôpital des Fatebenefratelli (littéralement “Faites le bien mes frères” : c’était l’exhortation des frères de Saint-Jean-de-Dieu qui gèrent le site depuis son origine).

On peut faire aujourd’hui le tour de l’île Tibérine via une large promenade aménagée.

 

ℹ ROME ET LE TIBRE : JE T’AIME, MOI NON PLUS…

Pour des Français, habitués à ce que les rives d’un fleuve soit magnifiés, c’est toujours une surprise de voir à quel point le Tibre semble laissé à l’abandon à Rome… Chaque traversée du fleuve donne l’impression d’entrer dans une autre monde,sans contact avec la rive opposée.  Et pourtant, il serpente entre les quartiers historiques de Rome… Quelle somptueuse promenade il serait !

Il faut dire que ce dernier peut difficilement être comparé à la Seine : c’est un fleuve plutôt sauvage, sortant de son lit plusieurs fois par an, qui toujours suscité la peur et la méfiance et ce dès l’époque romaine. Sans compter que son statut étrange (ses eaux sont en effet définies comme “maritimes”) fait de son entretien et de sa mise en valeur un imbroglio administratif et juridique inextricable…

Ses abords délaissés ont servi de décor à la déambulation mélancolique de Jep Gambardella (Toni Servillo) dans le film La Grande Bellezza (voir ci-dessous). À la belle saison, des terrasses et des concerts donnent tout de même vie à ces quais historiquement ignorés et méprisés.

 

 

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